[Test] Blade & Soul, ou l’art du Wu-xia condensé dans un MMORPG

En cette fraîche période de janvier, nous restons sous la couette pour tester la récente localisation occidentale de Blade & Soul, un MMO coréen dont les personnages sont visiblement beaucoup moins frileux que nous…

Fiche Technique

  • Support de test : PC / OS W7 64 bits / Intel Core i5-2500K 3,30 GHz / 8 Go RAM / Asus GTX 760 (2Go VRAM)
  • Version du jeu testée : version commerciale (serveurs nord-américains)
  • Éditeur : NCsoft
  • Développeur : NCsoft
  • Type : MMORPG sur le thème des arts martiaux
  • Date de sortie : 19 janvier 2016

Bienvenue à toi, petit scarabée

Présent au pays du matin calme depuis 2012 avant de faire son arrivée chez nous en janvier, Blade & Soul se présente comme un MMORPG gravitant autour du thème des arts martiaux dans un univers fantasy à la sauce orientale/asiatique. Le jeu propose d’incarner 4 races (les puissants Gon, les très ordinaires Jin, les élégantes Yun, et les mignons Lyn) qui auront chacune accès à 3 classes parmi les 7 existantes (Maître du Sabre, Destructeur, Gardien de la Nature, Maître des Eléments, Maître du Kung-Fu, Assassin, et Lame Dansante).

Concrètement, les classes sont assez diversifiées, et proposent chacune un gameplay proprea contrario de certains MMO free-to-play qui se content de conserver le même système à base de point’n’click, peu importe la classe. Ici, les combos et les manières de jouer divergeront très largement selon le choix que vous aurez effectué. Par exemple, le destructeur (guerrier équipé d’une hache à deux mains) aura accès à des capacités lui donnant la possibilité de gérer le terrain en s’adaptant au nombre d’adversaires une fois passés les 3 premiers coups nécessaires au remplissage d’une jauge activant les techniques spéciales. Quitte à encaisser pendant ses coups dévastateurs. Le Maître du Kung-Fu, lui, devra rapidement enchaîner ses techniques sous forme de combo pour ne laisser aucun répit à l’adversaire, prenant soin au passage d’utiliser sa capacité de contre pour temporiser les attaques adverses qui réussiraient à passer à travers vos coups. Chaque classe a ainsi son gameplay propre, et le jeu vous indique clairement le niveau de difficulté de chacun d’entre elles. Le Maître du Kung-Fu est ainsi la plus compliquées des classes, car la plus fragile si vous n’êtes pas assez rapide ou si vous avez un très mauvais timing. A ce niveau, Blade & Soul fait assez fort.

Passé le choix de la race et de la classe associée vient ensuite le moment de la création physique du personnage. Un vrai choix de voix, des proportions corporelles à régler au millimètre près, un large panel de coiffures et autres pilosités faciales, des tatouages, des cicatrices, … la liste est longue, très longue, et Blade & Soul s’offre le luxe de permettre la création de personnages très précis, ce qui – à moins d’être peu inspiré – vous permet d’avoir un personnage vraiment à vous, très souvent différent de ceux des autres joueurs que vous croiserez. D’ailleurs, sur une note un peu plus légère, on notera ce sens du détail jusque dans les poitrines des personnages féminins. Visiblement dotées de lois de la physique qui leurs sont propres, on en vient à se demander si NCsoft n’aurait pas débauché des réalisateurs ayant participé à l’anime de Highschool of the Dead pour réaliser ces animations improbables qui se déclenchent au moindre mouvement du personnage. Sans compter le fait que l’on peut également régler leurs alignements vertical et horizontal en plus de leur taille… on ne pourra qu’en rire ou trouver ça ridicule, je vous laisse juge. Personnellement, j’opte pour les deux.

Votre personnage créé, vous êtes aussitôt catapultés dans une jolie cinématique d’introduction qui fait office de mini-générique et vous présente l’origine de votre personnage (la même pour toute les races/classes). Le tutoriel démarre ensuite, signant ainsi le début des aventures de votre « petit scarabée ».

Une direction artistique loin d’être édul-corée

Ce qui frappe d’entrée de jeu, c’est la beauté de Blade & Soul. La Direction Artistique du jeu est de toute beauté, regroupant des musiques d’ambiance adaptées au décors et qui ne sont jamais redondante ni agaçantes, et un design global particulier. Accompagnant votre progression, les musiques réussissent le pari d’être à la fois présentes et en retrait, soutenant le rythme de vos promenades et de vos combats sans trop s’imposer à l’oreille. Là encore, pour un MMORPG free-to-play, c’est assez rare. Graphiquement, Blade & Soul ne peut pas nier qu’il est avant tout un jeu asiatique, avec ses artistes profondément inspirés par la culture millénaire de leur continent. Très stylé, le jeu possède son identité avec des designs de personnages et d’environnements qui ont le mérite de nous proposer un réel dépaysement, au sein de décors très travaillés, et dégageant chacun une atmosphère personnelle. On se surprend ainsi à vouloir de temps en temps poser dans le décor pour prendre des captures d’écran de son personnage devant une montagne embrumée ou un cerisier blanc, afin d’immortaliser l’instant durant lequel nos mirettes perdent le fil de l’action pour se perdre dans l’observation passive de la nature environnante.

Le jeu tire également son épingle du jeu au niveau des animations, et si certains éléments nous rappellent qu’il s’agit bel et bien d’un MMO, on aurait tout de même tendance à se croire dans un beat’em all, au vu de la fluidité des techniques exécutées. Et même si le système de ciblage est parfois un peu défaillant (il suffit d’être parfois un peu à côté de la cible pour ne plus pouvoir taper si on ne se recentre pas sur l’ennemi avant), on apprécie rapidement le fait de ne pas avoir à enchaîner des suites de coups rigides et insipides. En vertu de cela, on en viendra assez vite à vouloir tester les différentes classes pour la curiosité, et ainsi savoir ce qui nous convient le mieux au-delà de la préférence traditionnelle que l’on peut avoir pour tel ou tel type de classe.

Par contre, point qui fera débat pour savoir si le jeu entre dans le domaine du kitsch ou du chara-design assumé, les tenues « aérées » des personnages de Blade & Soul ne réussiront pas à faire taire les clichés circulant depuis longtemps sur le design – et l’efficacité relative – des tenues au sein des MMORPG coréens. Hommes et femmes sont ici logés à la même enseigne, entre les festivals de décolletés ouverts et la foire aux muscles virilement ostentatoires. Mais il est important de noter que le jeu évite avec brio l’écueil du mauvais goût malgré ce genre de choix artistique, les tenues du jeu étant globalement magnifiques et très variées dans l’ensemble. Lorsque le fan-service prend le pas sur l’artistique, on tombe rapidement dans le putassier, ce qui nuit à l’œuvre-support. Blade & Soul, lui, privilégie la beauté des tenues et le charisme ainsi apporté aux personnages, utilisant ce rapport au corps comme un outil lui permettant de s’offrir une identité visuelle et non un argument marketing. Ceci est extrêmement appréciable.

Un gameplay et un scenario inversement proportionnels en intérêt

Lorsque l’on s’essaie à Blade & Soul, on remarque d’emblée quelques idées intéressantes aux inspirations parfois tirées de la culture RPG, comme l’usure de l’arme, ou l’identification de certains objets avant de pouvoir les utiliser ou d’en connaître les spécificités. Évidemment, si ces procédés ont avant toute chose une utilité marketing au sein d’un modèle free-to-play, le recours à ces systèmes est loin d’être abusif, ce qui les empêche de nuire au plaisir du jeu. Avec de la débrouillardise et un zeste de patience, on a souvent ce dont on a besoin sans avoir à débourser quoi que ce soit. Et c’est d’ailleurs l’une des autres forces du jeu : Blade & Soul n’a rien du pay-to-win. Le magasin est avant tout rempli d’éléments cosmétiques, d’éléments d’artisanat que vous pouvez obtenir avec quelques efforts, et propose des items vous permettant d’influer directement sur les contenus de coffres offrant normalement du loot aléatoire. Les éléments payants sont ainsi des gains de confort, et non des avantages cruciaux vous permettant de prendre trop de longueurs d’avance sur les autres joueurs. La possibilité d’être en premium est sûrement l’avantage le plus intéressant du lot. Celui-ci vous apporte des gains classiques d’XP, d’or, et de réduction de frais divers, et se démarque en vous proposant un système de points fidélité. Dans les grandes lignes, plus vous jouerez en tant que membre premium, et plus vos avantages seront conséquents sur la durée. Il s’agit ici d’avantages qui vous aideront à aller un peu plus vite dans vos gains d’expérience et d’argent, et bien qu’appréciables, les aficionados du jeu 100% gratuit ne seront pas lésés pour autant vis-à-vis de leurs camarades. Surtout si l’on prend en compte le fait que les quêtes fournissent suffisamment d’expérience pour ne pas avoir à recourir au farm intensif, un ressort parfois trop présent dans les free-to-play bas de gamme.

Le jeu vous propose également de gagner des récompenses via un système de sondage disponible à plusieurs étapes de votre montée en niveaux. En répondant à quelques questions posées par les développeurs du jeu, vous avez ainsi la possibilité de gagner des objets fort utiles (kits de réparation, d’identification d’objets, …), tout en participant à l’amélioration du jeu. Ceci, ajouté à un jeu de plateau à la participation quotidienne, permet au joueur de se faire des bonus de manière plaisante et interactive.

Mais Blade & Soul possède aussi ses points noirs au niveau du gameplay. Les donjons, par exemple, partagent les loot rares en imposant un système d’enchères, ce qui déséquilibre totalement la balance des rétributions concernant les efforts fournis en permettant aux plus riches d’enchérir plus facilement pour remporter les items convoités. Pour jouer en équipe de manière à s’assurer une répartition équitable des récompenses, on privilégiera donc le jeu en clans (l’équivalent des guildes) et/ou avec des amis. Avec des inconnus, on s’en remettra au fair-play, vertu malheureusement assez rare. Quant au système de jobs (« guildes ») censé vous permettre de vous spécialiser dans certaines actions de récupération de matières premières utiles (ramassage de pierres, de nourriture, de gemmes, etc.), celui-ci est assez flou et ne propose pas vraiment de quêtes, vous laissant en roue libre pour trouver les objets dont vous avez besoin afin de progresser au sein de la spécialisation choisie et ainsi accéder à du crafting de haut niveau. Heureusement, on pourra changer de guilde comme on le souhaite, sans aucune pénalité.

Autre point qui paraîtra sans doute anecdotique à certains mais qui demeure important pour qui accorde toujours de l’importance à l’acronyme « RPG » présent dans « MMORPG » : le scénario. Calqué sur le style narratif des Wu-xia, ces récits asiatiques tournant autour d’un héros solitaire épris de justice, l’histoire du jeu est jalonnée de clichés typiques du genre : quête pour venger le maître défunt ou l’ami disparu, clivage manichéen entre gentils et méchants, jolis minois et comiques de service, muscles saillants et huilés, etc., le tout n’étant qu’un vaste prétexte pour enchaîner les coups de tatane. Loin d’être un défaut véritable, ce style de narration est cependant très particulier et ne plaira pas forcément à tout le monde, même s’il faut avouer que cela lui donne un certain charme. Si la quête principale en elle-même est moyennement passionnante, les quêtes secondaires sont encore pires et on en vient vite à passer les dialogues sans états d’âme pour obtenir son permis de chasse à l’XP, sans s’intéresser à l’histoire de la femme vous demandant de ramasser des baies dans le but de créer une soupe pour l’aveugle du patelin d’à côté… Heureusement, les nombreuses cinématiques et le soin apporté aux mises en scène permettent de raviver régulièrement la flamme de l’intérêt porté à la trame principale et qui a tendance à s’éteindre rapidement.

Une expérience utilisateur qui peut encore être améliorée

Plus techniquement, enfin, les serveurs rencontrent parfois quelques rares problèmes de connexion (surtout les nord-américains, utilisés pour ce test). Relativisons, cependant, ce genre de problème est du genre à être vite résolu, et cela ne devrait pas poser de problème sur le moyen et long terme. Le jeu vient de sortir en occident, et il est courant de rencontrer ce genre de petit pépin au lancement. Le seul réel souci, dans ce genre de cas, est que le jeu se ferme totalement en cas de déconnexion, vous forçant à relancer tout depuis le début pour tenter une nouvelle connexion, ce qui peut être très long… un retour à l’écran d’accueil aurait été plus judicieux. On déplorera également, dans le registre technique, l’écrasante et étouffante présence de spambots, ces faux-comptes qui se connectent à un jeu en ligne et dont le seul but est d’en spammer le chat avec des liens renvoyant vers des sites malintentionnés vous proposant d’acheter de l’or ou de tricher – et qui ne sont rien de plus que des attrape-nigauds. Il est donc assez difficile de discuter normalement avec ce flux constant de liens qui défile dans la chatbox, et le système de blocage de joueurs – limité à 50 – ne suffit pas pour réduire le spam. NCsoft devra donc d’urgence travailler sur un filtre ou sur un système anti-bot afin de corriger un problème qui a tendance à agacer les joueurs, agacement qui se constate régulièrement dans les rares fils de discussion que l’on réussit à suivre en période d’accalmie.

Toutefois, au chapitre des bonnes idées, l’UI réglable permet d’éviter les prises de têtes liées au placement arbitraire de certains éléments d’affichage, et le panneau des options offre des paramètres très nombreux concernant la configuration des touches et le gameplay à la manette pour ceux qui seraient intéressés par une telle option.

LES TOPS

LES FLOPS

  • 👍 L’univers du jeu, très stylé
  • 👍 Le gameplay semi-beat’em all
  • 👍 L’absence d’aspect pay-to-win
  • 👍 Les classes très variées
  • 👍 Une personnalisation des personnages extrêmement poussée
  • 👎 Les spambots qui dominent le chat
  • 👎 Le scenario qui manque de profondeur
  • 👎 Le système d’enchères sur les items d’un donjon
  • 👎 Les quêtes secondaires peu intéressantes