[Test] RimWorld : dans l’espace, personne ne vous entendra crier

Si vous aviez toujours rêvé de vous échouer sur une planète hostile avec un yorkshire, un pyromane et un asocial comme seuls compagnons, RimWorld est fait pour vous.

Fiche Technique

  • Support de test : PC – OS Windows 7 64 bits / Intel Core i5-2500K 3,30 GHz / 8 Go RAM / Asus GTX 760 OC
  • Version du jeu testée : version Early Access fournie par Ludeon Studios
  • Développeur : Ludeon Studios
  • Éditeur : Ludeon Studios
  • Type : survie/stratégie/craft
  • Date de sortie française : 16 juillet 2016 (date de l’Early Access – date de sortie de la version finale inconnue)

Issu d’un financement Kickstarter en octobre 2013, RimWorld a depuis fait son bonhomme de chemin sur la scène indépendante, rencontrant un vif succès auprès des joueurs avant son débarquement récent sur Steam. Actuellement en Alpha 13, le jeu est cependant très jouable et proche de sa version finale. Si graphiquement, le jeu ressemble fort à Prison Architect, ne vous y trompez pas, les deux jeux sont issus de deux studios différents, l’auteur de RimWorld ayant demandé la permission de s’inspirer du design épuré de Prison Architect pour des raisons pratiques.

L’un des objectifs de RimWorld (qui n’est que l’un des scénarios jouables parmi une infinité que vous pourrez créer) est de vous faire incarner des humains échoués sur une planète après des années voire des siècles de stase, et dont le but sera de survivre en bâtissant un camp. A terme, après avoir survécu aux ennemis divers et autres catastrophes qui ne manqueront pas de leur tomber sur le coin de la figure, il leur sera possible d’envisager de quitter leur colonie pour des horizons plus cléments…

L’annale des colons

Lorsque l’on démarre RimWorld pour la première fois, on a l’agréable surprise de constater que le jeu est traduit en français, même si la traduction n’est pas encore omniprésente. La majorité des jeux indépendants n’ayant pas les moyens de s’offrir une localisation en langue étrangère et/ou ne possédant pas de communauté suffisamment active pour en réaliser une à l’œil, ce sont parfois plusieurs perles qui passent à la trappe auprès des joueurs non-anglophones pour qui la langue anglaise est une barrière de taille. Premier bon point pour Rimworld, donc, qui propose plusieurs langues dont le français, et dont la traduction est sans cesse améliorée au fil du temps.

Plusieurs possibilités s’offrent ensuite à nous avant de démarrer une partie : aller bidouiller dans les options, jeter un œil aux mods via le Steam WorkShop, et créer une nouvelle colonie. Cette dernière va se dérouler en plusieurs étapes : tout d’abord, il vous faudra choisir votre scenario entre les trois proposés. Le premier vous permet de prendre le contrôle d’un groupe de 3 survivants (et leur animal) éjectés de leur vaisseau spatial et qui vont sortir de leurs capsules de stase pour apprendre à survivre en milieu hostile et espérer repartir dans l’espace un jour ; le deuxième vous propose de jouer avec un groupe de 5 indigènes, des natifs du monde sur lequel vous évoluerez ; quant au troisième, celui-ci est un peu plus hardcore et vous met dans la peau d’un seul et unique personnage, un riche quidam en quête d’aventure.

A savoir que RimWorld n’est pas le genre de jeu à vous bloquer dans des règles rigides et immuables. La page scénario vous permet d’utiliser ce que l’on appelle des seed (= « graines » ou « germes » en français), une suite de caractères qui génèrera au hasard votre équipement ainsi que votre groupe de départ. Concrètement, nous recommandons cette option une fois les bases du jeu maîtrisées, le caractère aléatoire des scénarios créés avec ces seed rehaussant nettement la difficulté du jeu.

Scène à risque

Ensuite vient le moment de choisir l’IA scénariste, l’intelligence artificielle chargée de gérer les évènements qui se produiront au fil de vos aventures. Concrètement, l’objectif est ici de fournir un système capable d’adapter les évènements en fonction de vos actions, bien que les RNG (Random Number Generator, ou « générateur de nombre aléatoire » en français, ndlr) semblent également avoir une influence notable au cours de la partie.

Dans RimWorld, nous avons donc le choix entre 3 IA : Cassandra Classique, Phoebe l’Amicale, et Randy Hasard. La première est l’IA « par défaut », générant des évènements à un rythme cadencé mais à peu près gérable. La deuxième est une IA bien plus pacifique, générant des évènements de temps à autres tout en faisant attention à laisser du temps aux joueurs pour gérer l’aspect construction du jeu. Quant à Randy, il incarne ce que l’on aurait pu nommer le « mode chaos », celui-ci balançant tout au hasard, transformant la partie en un véritable champ de mines scénaristique, le meilleur comme le pire pouvant se succéder à tout moment. Chacune des 3 IA possède néanmoins 5 niveaux de difficulté, vous permettant par exemple de tester Randy sans pression, ou de se la jouer architecte sans pour autant s’ennuyer avec une Phoebe un peu plus corsée.

Aller à Toire

Le choix du scenario – pour peu qu’il ne provienne pas d’un long tâtonnement à base de seeds – ainsi que celui de l’IA scénariste sont pour ainsi dire les étapes les plus courtes du processus de création de partie. Ce qui suit est nettement plus laborieux pour les joueurs tatillons qui souhaitent optimiser au mieux leurs débuts de partie.

Ainsi, juste après le choix d’IA vient la génération de la carte. Ici, pas de maps préconçues, uniquement une seed à rentrer pour générer une planète de manière totalement aléatoire après avoir choisi la taille de celle-ci. Ensuite, il vous faudra choisir le biome dans lequel vous évoluerez (glacial, jungle, tempéré, désertique, …), chacun possédant avantages et inconvénients : les déserts favoriseront l’énergie solaire grâce au peu d’évènements climatiques capables de brouiller le ciel, la jungle – sûrement le meilleur environnement pour débuter – permet de cultiver des végétaux toute l’année et n’est pas avare en faune à chasser, etc. Si vous cherchez un challenge bien hardcore, donc, choisissez un biome glacial avec des températures extrêmement basses, vous nous en direz des nouvelles si vous dépassez les 5 premières minutes de jeu.

Enfin, après l’étape du choix de la carte, vous aurez enfin le loisir de passer à la création de personnage. Ici, « création » est un bien grand mot, car la génération du ou des personnages qui inaugureront votre début de partie est, là encore, quasi-totalement aléatoire. Loin d’être un désavantage en terme de gameplay – bien au contraire – on avoue cependant que cette phase peut s’avérer très très longue si vous souhaitez avoir un minimum d’avantages avant de vous lancer à corps perdu dans l’environnement hostile de votre site d’atterrissage.

La fiche personnage est diablement complète et a presque de quoi faire pâlir certains jeux de gestion/RPG de taille similaire. Celle-ci se divise en plusieurs catégories : Histoire, Incapacités, Éléments marquants, Compétences, Santé, et Relations. Et leur importance n’est pas si anodine que ça :

  • L’histoire contient deux informations cruciales : l’enfance et le statut à l’age adulte. Un enfant traumatisé par un évènement marquant, par exemple, aura des malus à la compétence Social. Et un adulte avec une formation de tireur d’élite aura logiquement un bonus à la compétence Tir.
  • L’incapacité d’un personnage liste les tâches que celui-ci ne pourra pas remplir. « Incapable d’actions violentes », par exemple, signifie que le personnage n’aura strictement aucune compétence en Tir et en Mêlée. Il sera donc inutile en combat et inapte à la chasse, celui-ci ne pouvant tenir une arme. Il y a également ceux incapables de faire le ménage, de transporter des objets, etc. Il est donc important, généralement, d’avoir des personnages avec le moins d’incapacités possible.
  • Les éléments marquants, eux, en rajoutent à la somme des bonus/malus, mais de manière plus large, n’influant pas que les compétences. Un personnage gay, par exemple, sera attiré par les personnes de même sexe, et pourra être malheureux s’il est le seul de sa colonie et qu’il ne peut avoir de relations amoureuses. Un personnage qualifié de « pressé », lui, sera plus rapide au niveau des déplacements (à l’inverse du flemmard). On pourra également croiser des personnages névrosés, plus aptes à paniquer en cas d’inconfort ou de pression, ce qui augmentera les chances de les voir devenir nervous breakdown en pleine partie.
  • Les compétences, comme le nom l’indique, listent l’efficacité des aptitudes (cf. image ci-dessous). Pour une partie avec plusieurs personnages de départ, il sera crucial d’avoir plusieurs spécialistes différents, et non trois clampins forts en mêlée mais tous incapables de planter une carotte.
  • La santé dresse un bilan des malus liés à la condition physique d’un personnage. Des cicatrices baisseront la somme des points de vie de tel ou tel membre du corps, quand d’autres afflictions pourront toucher le moral ou déclencher des problèmes de santé plus sérieux au fil du temps (cœur fragile, asthme, etc.).
  • Enfin, les relations forment un trait plutôt rare, et uniquement activé quand vous débutez avec plusieurs personnages. Les relations peuvent être familiales ou maritales, mais peuvent aussi indiquer un lourd passé entraînant un malus relationnel avec un autre personnage (un ex, par exemple).

Il sera donc facile de passer pas mal de temps à tambouriner le bouton « aléatoire » pour tenter d’obtenir des personnages les plus équilibrés possibles et ainsi maximiser vos chances de réussite une fois dehors au beau milieu de nulle part. Cependant, si vous recherchez un challenge corsé et/ou un moyen de rigoler un bon coup devant les ennuis qui ne tarderont pas à arriver, vous pouvez également y aller en mode #YOLO et prendre les premières fiches personnages qui vous passent sous le nez. Commencer la partie avec un pyromane incapable d’éteindre des incendies (mais capable de les provoquer en pleine nuit) peut être un bon moyen de pimenter le jeu. Surtout si ledit pyromane est accompagné d’un animal bête comme ses pieds dont la seule utilité sera de piocher dans les réserves de nourriture. Ou si l’un de ses compagnons d’aventure est un névrosé chronique qui sera vite incontrôlable lors de situations de stress, abandonnant armes et habits pour aller se promener nu en plein milieu de la nature (véridique).

Bienvenue sur Tataouine

Après tous ces efforts (ou pas), RimWorld vous parachute sur la planète choisie, à l’endroit indiqué précédemment. Si le jeu vous prend en main avec quelques messages vous demandant d’accomplir certaines actions afin de vous informer que celles-ci sont possibles, force est de constater que le tutoriel en lui-même est plutôt faiblard. Abandonné au beau milieu de nulle part, il faudra comprendre les mécaniques de jeu tout seul, ou – et c’est fortement conseillé – avec le Wiki officiel en arrière-plan ou sur l’écran d’à côté si vous avez la chance d’en avoir un.

En lui-même, RimWorld n’est pas très compliqué à prendre en main : un clic sur un des personnages vous donne accès à un menu lié à celui-ci (social, compétences, …), et la barre du bas vous permet de paramétrer plusieurs aspects de la partie telles que la construction, la gestion des animaux, ou encore la priorisation des tâches. Les joueurs de Prison Architect (sorti récemment sur console, ndlr) ne seront pas dépaysés par l’ergonomie générale de RimWorld qui s’inspire largement du jeu de gestion pénitencier.

D’ailleurs, revenons sur le système de priorisation des tâches de RimWorld, celui-ci étant redoutable d’efficacité pour éviter de trop coller aux basques de vos personnages en les laissant bosser tous seuls comme des grands sans qu’ils ne fassent trop de sottises.

En mode simplifié, ce tableau à double entrée listant vos personnages et les tâches quotidiennes vous permet de cocher les occupations de chacun, laissant vos colons/indigènes se charger de la priorité, ce qui est loin d’être recommandé. En passant en mode développé, par contre, le système devient très intéressant, avec la possibilité de mettre des priorités chiffrées allant de 1 (priorotaire) à 4 (pas du tout prioritaire). Ainsi, Grudu, mon colon fort en Tir + Minage et possédant quelques compétences modestes en Construction pourra être réglé de la manière suivante : 1 en Minage et en chasse, et 2 ou 3 en construction. En fonction des niveaux de compétences de vos personnages, vous pourrez ainsi régler les priorités, et avoir, par exemple, un médecin qui quitte sans attendre la gestion de sa plantation de patates dès qu’un personnage est blessé.

Sachant que RimWorld vous permet de faire des prisonniers parmi vos assaillants afin de les recruter à plus ou moins long terme, ce tableau vous permet indirectement de savoir si tel ou tel ennemi blessé est un atout potentiel à votre colonie. Un personnage fort en Mêlée et en Tir, mais qui est incapable d’éteindre des incendie, de transporter des objets ainsi que de nettoyer les sols est un personnage dont vous ne pourrez pas vraiment tirer parti sur le tableau des tâches, celui-ci allant bailler aux corneilles dès qu’il aura fini l’une des rares tâches qu’il peut remplir.

Colon vs Wild

Résumer en un seul test toute la complexité du système de gestion de RimWorld est un exercice périlleux, tant il existe de choses à dire à son sujet. Une fois fraîchement débarqué, il est courant de s’y perdre dans les priorités : doit-on d’abord construire un générateur d’électricité ? Créer un entrepôt pour ses ressources ? Faire des chambres individuelles pour ses colons ? Une cuisine pour commencer à transformer la nourriture brute ? Établir une zone agricole ? S’il existe effectivement des ordres de construction pour plus ou moins bien commencer la partie, c’est au joueur de juger en fonction de son style de jeu, si celui-ci souhaite donner la priorité au bien-être des colons ou à l’efficacité des lignes de ravitaillement, par exemple.

RimWorld ne se contente d’ailleurs pas de faire de vous un architecte des planètes hostiles, il vous permet notamment de créer des liens avec les campements indigènes ou pirates proches, de faire du commerce, de créer des marchandises et de crafter de l’équipement, d’apprivoiser des animaux pour bénéficier de leurs ressources ou de leur puissance en combat, etc. Si vous avez de la chance, vous pourrez également trouver d’anciennes installations remplies de matériel diablement utile… mais aussi d’ennemis redoutables qu’il ne faudra pas affronter en début de partie. Entre ça et la chasse aux capsules de sauvetage et aux débris de vaisseaux, le minage de ressources rares, ou encore la mise en place de défense contre les raids ennemis, le joueur ne s’ennuie pas une seconde, surtout si l’IA choisie en début de partie n’a pas été réglée de façon trop pacifique.

Rajoutons également que les interactions directes avec les PNJ – qu’ils soient humains, animaux, ou cybernétiques – ne seront pas vos seules préoccupations. Le monde lui-même sera un adversaire redoutable dans votre quête de survie. Les éclipses se feront un plaisir de rendre caduques vos panneaux solaires, les invasions de castors décimeront les ressources naturelles de bois, les maladies mettront vos médecins et vos ressources à rude épreuve, quand un morceau de vaisseau rempli d’ennemis et de drones psychiques n’ira pas s’écraser sur le pas de votre porte. Et il ne s’agit là que des plus petits ennuis : les pluies empoisonnées réduiront la luminosité et empêcheront vos colons de sortir sous peine d’être malades, des insectes géants pourront sortir de terre pile sous le plancher de votre cuisine, et une vague de canicule pourra même mettre le contenu de votre frigo en danger et flanquer des insolations à toute votre équipe passant du temps dehors.

Bref, RimWorld est un jeu qui vous veut du bien, mais qui est un peu sadique sur les bords – ce qui est loin d’être un défaut. A vous de voir si vous êtes suffisamment masochiste pour l’adopter.

LES TOPS

LES FLOPS

👍 Un aspect gestion poussé à l’extrême.
👍 Une Early Access aussi jouable qu’une version définitive.
👍 La satisfaction ressentie à chaque catastrophe subie sans trop de dommages.
👍 Un grand potentiel de rejouabilité.
👎 Création de partie parfois très longue à cause de l’omniprésence de l’aléatoire.
👎 Le pathfinding (= les déplacements gérés par l’IA) des colons est loin d’être optimal.👎 Le manque de tutoriel rend les débuts un peu poussifs.
👎 Le facteur chance un peu trop présent au niveau des ressources disponibles.