[TEST] Yakuza 0 : la dernière bombe lâchée par SEGA

Vingt-deux mois après sa sortie japonaise, Yakuza 0 débarque enfin en Occident et représente une très bonne surprise de ce début d’année 2017.

Si Yakuza 6 a envahi les foyers japonais le mois dernier, c’est bien Yakuza 0 qui débarque chez nous le 24 janvier prochain sur PlayStation 4. Celui-ci se déroule donc avant les événements qui se sont déroulés dans Yakuza premier du nom, publié à l’époque sur PS2 en 2005. Si son succès a été notable lors de sa sortie au Japon, il est coutume de se demander s’il fait partie des jeux qui s’exportent très bien en Occident. Autant être honnête avec vous, Yakuza 0 a toutes les chances de conquérir le marché européen tant le dynamisme de son gameplay procure de belles sensations au joueur. Mais d’un autre côté, certains éléments ne plaident pas en sa faveur. Retour en quelques mots sur les aventures de Kyriu Kazuma et Majima Goro.

Une mise en scène grandiose mais non pas sans défaut

S’il faut retenir un aspect primordial de Yakuza 0, cela demeure sa mise en scène. Vous êtes plongés dans l’univers mafieux japonais et SEGA n’y est pas allé de main morte au niveau de la réalisation. Ainsi, que ce soit pour narrer l’histoire de Kazuma Kyriu ou celle de Majima Goro, les développeurs se sont attardés à retransmettre au maximum l’atmosphère d’un film de yakuza.

Cela comporte deux répercussions notables. La première profite à l’écriture du scénario dont la profondeur est incontestable. Dans un premier temps, nous sommes plongés dans l’histoire de Kyriu qui se voit piégé et accusé d’un meurtre qu’il n’a pas commis. A partir de là, commence sa recherche de la vérité mais aussi son éloignement du clan qu’il croisera à nouveau irrémédiablement. Ensuite, nous vivons les péripéties de Goro Majima dont l’objectif de se refaire une place parmi les yakuzas l’amènera dans bien des conflits et un grand dilemme. Pour chacun de ces deux héros, nous assistons à une mise en scène de qualité, s’appuyant sur des cinématiques qui peuvent bien durer plus de 10 minutes.

Chez certains, cela ne posera aucun problème, notamment les habitués de la licence. Par contre, chez les autres, les joueurs qui voudraient s’y intéresser, ils pourraient avoir bien du mal à entrer dans l’univers qu’il propose. C’est notamment dû au fait que Yakuza 0 ne bénéficie d’aucune traduction française, vous devrez suivre le déroulement des événements en japonais pour les voix, en anglais pour les sous-tires. Honnêtement, avec presque deux ans de retard sur les Japonais concernant la sortie, nous aurions apprécié un effort et une traduction française. Certes, la narration représente un immense travail tant les cinématiques sont omniprésentes et les dialogues réguliers, mais deux années d’écart, ce n’est pas rien. Second problème qui pointe le bout de son nez à partir de là, le rythme. Nous passons probablement plus de temps à suivre la mise en scène qu’à jouer et se bastonner. Ainsi, nous aurions aimé que les dialogues soient parfois écourtés ou moins présents et cela constituera peut-être un frein pour les novices.

Enfin, le rythme se montre parfois inégal entre les différents chapitres de l’histoire. Si elle commence par les chapeaux de roue, on remarque une baisse de rythme conséquente au bout de quelques heures. Cependant, lorsque la cadence diminue, c’est souvent pour préparer un rebondissement plutôt marquant. Par exemple, avant la finalité de la quête de Makoto, nous passons de (trop) longues minutes à poursuivre une piste inintéressante pour aboutir à une chute plutôt bien sentie. De même lors d’une seconde quête qui amènera à la rencontre d’un chef yakuza bien embêté par vos activités. On regrette par contre que la tension n’augmente que par à-coup et que le rythme soit donc saccadé.

Nous apprécierons néanmoins la fidélité dans les valeurs qui se transmettaient dans l’univers mafieux japonais. Cette interdiction de transgresser les codes des Yakuza constituait une réelle priorité dans le milieu et le code d’honneur avait de réelles répercussions sur la vie ou l’intégrité physique de ses membres. Cela se traduit notamment par la volonté du héros de laver son honneur et de se disculper d’une faute qu’il n’a pas commise en quittant le clan, lui permettant d’enfoncer les portes avec plus de facilité. On retrouve également une notion d’intégrité très forte chez les individus, ici le proverbe « la fin justifie les moyens » n’a pas sa place, le code d’honneur étant trop important. Par contre, l’ambition d’aspirer à une place plus importante et la lutte entre les clans demeurent parfaitement mises en scène.

De la dynamite des combats dynamiques !

Entre deux cinématiques ou discussions, vous aurez tout de même droit à votre balade en ville ou votre incursion dans des bâtiments malfamés. Dès lors, nous sommes propulsés dans des affrontements plutôt dynamiques et un système de combat de qualité. Vous serez souvent seul contre plusieurs bandes de loubards, plus ou moins armés mais vous pourrez compter sur une palette de coups qui se garnit avec le temps.

De ce fait, chaque héros peut compter sur 3 styles et chacun possède ses propres patterns. Par conséquent, Kyriu pourra compter sur les techniques Rush dont les mouvements sont très rapides, le style Brawler qui lui permet de ramasser des objets et de porter des coups avec, il gagne donc en puissance. Ceux-ci sont facilement dissociables puisqu’une aura rose entoure le personnage lorsqu’il est en mode Rush et elle devient bleue quand il se change en Brawler. Enfin, il gagne en puissance dès lors qu’il transforme ses techniques en Beast, l’aura est jaune, ses gestes sont plus puissants encore, plus brutaux mais moins rapides et perdent aussi en précision. Ce qui est encore plus appréciable, c’est que chaque style amène ses propres techniques et ses propres combos et il sera utile d’osciller entre l’un et les deux autres selon les situations.

  • Les actions spéciales en une minute de vidéo

Quant à Goro, il peut compter sur trois autres styles : Breaker, Slugger et Thug. Si ce dernier ne se démarque pas tellement des frappes du premier héros, le style Breaker s’apparente à de la capoeira et lui lègue une réelle identité. Tout apporte une réelle variété dans la façon d’aborder un affrontement et procure des sensations agréables au joueur.

Enfin, chaque style comporte son propre arbre de compétences qui nécessitera de l’argent pour être amélioré et votre progression dans le jeu pour débloquer tous les éléments. N’omettons pas également que chaque personnage aura son propre coach qui lui apprendra 5 techniques supplémentaires, notamment pour se défendre et contrer. SEGA se permet même quelques séquences QTE qui ont une réelle influence sur le combat puisque un échec sera souvent synonyme de mort.

La ville, entre activité et restriction

A côté de la trame principale, SEGA a implémenté une centaine de quêtes annexes. Pour se lancer dans celle-ci, pas besoin d’un vaste open-world et d’une trop longue exploration, nous sommes confinés dans deux quartiers vraiment vivants. Il ne se passera pas une minute sans que vous croisiez un groupe de personnes hostiles prêt à en découdre. A côté de cela, des PNJ à tous les coins de la ville qui vous lancent dans des missions secondaires dont l’intérêt est là aussi inégal. L’intégrité et la sensibilité du héros le poussent à rendre service à n’importe quel passant. Si certaines missions sont parfois inutiles (cf prétendre d’être en couple avec une jeune japonaise pour l’aider à confronter son père), d’autres sont clairement plus inspirées, par exemple la récupération d’un jeu vidéo pour un enfant lâchement dépossédé de son bien.

Outre cela, vous ne devez absolument pas passer à côté des minis jeux intégrés dans certains quartiers. Si les fléchettes, le bowling ou le billard divertiront quelques minutes, les activités disco et karaoké sont épiques. Quand on passe d’un contexte plutôt sérieux à un ambiance complètement décontractée, le contraste est édifiant et surtout… amusant. Ainsi, nous retrouverons parfois Kyriu en roue libre et complètement déchaîné lors d’un duel avec des clients réguliers des bars où tout le monde pousse la chansonnette.

  • La disco et le karaoké dans Yakuza 0 [Vidéo]

De même, nous apprécierons l’activité générale dans la ville, un lieu dans lequel prospèrent les commerces et pas seulement les bars karaokés ou les night-club. Nous retrouvons aussi les restaurants, les supérettes, les fast-food qui sauront vous requinquer ou vous donner envie de goûter les meilleurs whiskys et vins traditionnels… Les développeurs n’ont pas oublié non plus les bornes d’arcade où il est possible de jouer à des productions old-school mais aussi les vidéos-clubs pour des sessions « érotiques ».

De ce fait, on retrouve pas mal d’activités dans Yakuza 0, ce qui permet de faire disparaître un certain côté répétitif de l’exploration dans la ville. Car celle-ci reste plutôt limitée, vous ne pouvez pas vous balader n’importe où et vous vous confronterez parfois à des murs invisibles. Néanmoins, l’objectif du studio est très clair, ils ont souhaité fournir un résultat compact et c’est plutôt réussi. Pour les plus dévoués d’entre vous, vous vous attarderez à réaliser toutes les quêtes annexes, à vous permettre un petit fast-food, à faire un petit tour du côté du bowling ou à vous détendre sur de la disco et du karaoké.

On restera perplexe sur certaines fonctionnalités insérées dans le jeu comme la possibilité de développer une amitié avec certains PNJ. Ainsi, lorsque vous irez à une supérette en particulier, la vendeuse vous confiera son anxiété des premiers jours mais vous ne faites rien de particulier avec elle. Pour renforcer vos liens d’amitié, il vous suffira simplement d’acheter des produits chez elle, rien de plus. Pareil pour d’autres PNJ qui ne réclameront que votre visite pour augmenter la jauge d’amitié… pas vraiment utile.

Money, Money, Money

Dès les premières heures de jeu, nous pourrions nous montrer surpris d’avoir autant de billets sur les bras. On ne sait pas trop quoi en faire mais on sera très vite rattrapé par la réalité. Les millions de yen dans nos poches nous serviront notamment à développer nos techniques et nos deux personnages via les arbres de compétences. 400 000 balles pour le premier échelon, c’est correct… puis cela passe à 2 millions et nous devons déjà faire des choix dans notre investissement. Le troisième palier requiert 30 millions, ce qui nous pousse à nous demander comment il sera possible de récupérer ces fonds pour débloquer toutes les compétences qui se ressemblent presque toutes mais qui sont associées aux 6 différents styles de combat.

La course à l’argent passe à l’étape supérieure à partir du chapitre 5 lorsque vous mettez un pied dans l’immobilier. Vous devrez alors investir et faire fructifier votre argent, ce qui n’est pas trop difficile au vu des différents tutoriels et personnels qui vous guident. SEGA a donc pensé à l’importance du marché immobilier qui commençait déjà à s’étendre dans les années 80 au Japon. Il faut dire que le secteur joue un rôle prépondérant dans l’intrigue de Yakuza 0. Rien de bien novateur mais c’est déjà une bonne initiative d’avoir pensé à un système aussi simple soit-il.

Pour compléter l’expérience de jeu, vous aurez droit à quelques modes en ligne pour affronter vos amis et joueurs du monde entier. On y retrouve les minis jeux comme comme le karaoké et la disco pour déterminer si vous arriverez à devenir une légende de la discipline. Quelques défis bien corsés viennent alimenter aussi les modes de jeu, des défis que vous débloquerez en progressant dans le mode histoire. Il est aussi possible de revoir des cinématiques dans les replays pour les mordus du cinéma japonais.

Au final, Yakuza 0 reste une référence dans l’univers mafieux japonais avec une réalisation d’une grande envergure portée par l’omniprésence des cinématiques et la mise en scène d’un scénario de qualité. Si les novices se montreront peut-être réfractaires à l’idée d’être plus téléspectateur (d’un feuilleton non-traduit en français) plus que joueur à certains moments, la qualité scénaristique et le dynamisme des combats sauront convaincre, sans oublier les séquences détente lors des karaokés et danses disco. Sega garde encore dans sa poche une franchise de qualité et une valeur sûre pour les fans du genre.